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jeudi 27 novembre 2014

Un duel parmi d'autres

Quand s'ouvrent les
dernières heures du
jour, les doigts s'agitent
et balbutient quelques
mots neutres et civils.

Depuis peu le sourire
s'est dessiné face à 
l'écran bleu qui palpite
au rythme des duels.

Sans détours ils dévoilent
doucement leurs vie déjà
parcourue et ils savent, eux
deux, qu'ils ne se verront
jamais. Qu'importe ils jouent. 

mercredi 29 octobre 2014

Aux premières lumières

J'aime errer dans les rues
quand s'allument les ampoules
de la ville. L'harmonie de mes
yeux danse avec les ombres
effleurées derrière les fenêtres.

Et l''étincelle de mon regard se
façonne au crépuscule, ainsi qu' un
un rebond de la vie nocturne qui
m'attire et m'absorbe dans le
courant. Les rencontres

deviennent feutrées et font plisser
les paupières dans leur sourire.


HIC ET NUNC

Je ne crois ni aux lieux ni aux espaces,
je ne crois qu'à l'avoir lieu et aux
espaces-temps. Et quand je vois un café,
je l'imagine la nuit venue, porte close.

Ce matin, dans la lumière laiteuse de Béziers,
j'imagine le Bar à Lire de Sète où je fus naguère.
Dans l'entre-deux. Après le coup de feu de midi,
fourneaux éteints. L'odeur des mets partagés

flotte encore, se mêlant aux vents coulis qui apportent
la rumeur du port. Je suis assis dans l'encoignure,
un volume ouvert entre le pouce et l'index. C'est un
vieux livre, imprimé sur papier bouffant. Il y est

question d'un port et de gens interlopes, je crois y
reconnaître la main de Carco, mais suis trop fatigué
pour m'en assurer. Je laisse les lignes danser, je me
penche sur la page et en fait ma plage. Supplique pour

y être enterré.

Le Bar à lire

Prenez la Grand-rue serrée entre deux rangées
de murs défraîchis et laissez divaguer votre esprit
jusqu'à buter sur une ancienne boulangerie aux
stores repliés. Poussez la porte de verre. Fort
Car elle racle puis laissez-vous gagner par les
odeurs d'épices et de ragoût. Résistez à l'envie
de fermer les yeux pour les mieux savourer.
Décillez-les au contraire et faites votre miel
des livres pêle-mêle. Choisissez une table
au hasard. Asseyez-vous et écoutez. La mer,
la mer toujours recommencée dans les pas
de Brassens. On mange large et bien comme
chez soi, autrefois. Rosanna est au fourneaux
qui attendrit les viandes et Sophie abat les murs
de son pas léger. L'opulence fait de l'assiette un
plat. Nul formalisme. Ici la table est franche,
les produits bien choisis. Si l'heure ne vous taquine,
accompagnez le café fort de mignardises maison.
Et riez, surtout, riez de Mallarmé qui écrivait :
«La chair est triste et j'ai lu tous les livres.»
Ici la chair exulte et les livres sont à lire.

dimanche 5 octobre 2014

ECCE MULIER : ton corps au matin

La fatigue de la veille s'en est allée
avec le parfum de lavande des draps frais.
Tu dors, nuque brisée contre le lin froissé.

Au dehors, des coups de feu sporadiques rappellent
l'automne. Des hommes en bottes battent la nature
brumeuse. Tu es nue, respires à peine, ton corps est

pâle qui repousse l'Histoire de quelques heures ou,
peut-être, de quelques minutes. Je me penche et te
respire. Je ferme les yeux pour mieux te revoir.

Nous fûmes unis peau à peau, souffle à souffle, t'en
souvient-il dans ton sommeil profond ? Il n'importe.
Dehors, quand les chasseurs s'en seront allés, le laboureur

entamera la glaise froide de son soc inclément. Silence du
labour, suspens de la vie circulaire, déjà mes paupières
m'engluent. Je me couche à ton côté et te rejoins. Enfin.

lundi 15 septembre 2014

Épices, être soi, en face la mer

J'avais délaissé notre ombre, ma fleur,
trop de temps, inconsciemment, comme
pour mieux sentir le poids de l'absence.

Ou la griffure de l'insolence Et puis je t'ai lue,
un chewing-gum a menthol finissant de se
tarir dans ma bouche. Et j'ai aimé, je t'ai aimée

écrivant. Je t'ai approchée pour te reconnaître
et puis je t'ai connue. Un brin. Est-il de perception
plus intelligente que celle de tes épices. Je ne sais,

Je ne veux savoir, ça ne m'intéresse pas, et puis
tu as beau me traiter de flatteur, rien n'y fera,
tes mots ont la douceur de ton cou et je n'y pouvais rien.

samedi 6 septembre 2014

En face la mer

Pour les habitants de 
l'océan, la terre c'est 
le vide. J'aime imaginer
Leurs peurs et leurs
interrogations devant
les fourmis ou les souris. 

Plus de sérénité mais une
agitation fébrile qui secoue
Le sol et leur font regretter
Les doux remous de l'onde
Qui les appelle. Ils tournent
Le dos et regardent comme
Les marins l'étendue bleue. 

jeudi 4 septembre 2014

la porte

Vivre en soi et avec soi
S'entourer de mille façons
S'étreindre sans retenue
Jusqu'au bout des doigts. 

Embrasser son moi, demeurer
Figée et s'aimer comme un
Autre pourrait le faire. Je suis ainsi
Celle qui se déchire et s'admire. 

mardi 2 septembre 2014

La porte


J'ai poussé le bois, j'ai
Avancé un pied et je me
Suis arrêtée sur la beauté
Du monde insoupçonné.

La lumière intense sans
Retenue a lâché des êtres 
Mystérieux et las de vivre
Éblouis. Pour eux l'infini

C'est la nuit. Et moi je veux
Savoir la puissance de l'attrait
Jusqu'à la saturation des
Sens. Vivre  derrière l'oubli.



lundi 1 septembre 2014

La treizième

Dans le ciel la treizième
Lune est fière : elle est la 
Roue de la vie qui tourne 
Et revient à l'esprit, silencieuse.

Immense et lointaine, elle offre
Sa rondeur majestueuse aux
Pensées des hommes qui
La croient  ensorceleuse. 

Elle  sait son pouvoir, elle
Reviendra plus tard. Encore 
Ce mois- ci, puis un autre, 
Elle s'éloigne et se croit plus
Forte que ses sœurs malades

Et pâles dans leur flux de rigueur. 


samedi 30 août 2014

La machine à coudre

La vieille machine noire
n'a plus de beau jours.
La pédale qui rythmait
le pied aisé de ma grand-mère
a perdu son lustre et sa cadence.

Les aiguilles cassées ne sont plus
disposées. Elles sont brindilles que
L'on va jeter dans le quartier.

Elle n'est plus la main alerte
qui savait la guider et la modérer.
Mais j'aime ses contours encore
brûlants de l'ancien temps quand
Nos robes étaient cousues de fil blanc. 

vendredi 29 août 2014

Épices

Doux nom féminin, à la
palette des couleurs et
Aux étonnantes saveurs. 

Quel bel alliage subtil des 
arômes, et surprise des odeurs. 
L'inattendu dans chaque plat. 

Câlines et félines la vanille, la
cardamome, la coriandre invitent
aux voyages des sens en éveil. 

Et souvent je perçois en elles des
 pétillements masculins, 
la caresse et la force des hommes

aux détours des dégustations
salées, celles des eaux des océans lointains,
ou sucrées dans les desserts partagés
au coin d'une table intime et raffinée. 

Les épices offrent leur ballet dansant
et se promènent aux bras des couples.
Elles sont femmes dans leur attirance,
Elles sont hommes dans leur multiplicité.



mardi 19 août 2014

L'ampoule à incandescence

Fouillant dans mes affaires, à l'occasion
d'un réaménagement, j'ai retrouvé une ampoule,
comme on n'en fait plus, l'une de ces ampoules

accusées de jeter l'énergie par les fenêtres.
Son globe, non dépoli, tenait en main et gardait
encore des éclats de peinture blanche, souvenir

lointain d'un rafraîchissement de plafond, un jour,
à Montpellier. À l'intérieur, telle la ballerine
d'une boîte à musique, le filament dansait.

J'enfichai sa douille dans un plafonnier nu, vissant
avec peine son culot oxydé. Je descendis de l'échelle,
commutai et touchai le globe jusqu'à rougir mes doigts.

Encore aujourd'hui, je garde, au creux de ma paume, la marque
vive de cette découverte fortuite et pense, enfin, aux jours
heureux que je vécus la bas et, ingrat, ne sus pourtant goûter.

samedi 16 août 2014

Ta main est chaude

Ta main est chaude dans ma main, menue, tremblante,
tu me tiens et t'abandonnes ; la porte dépolie menace de
ses ombres l'équilibre retrouvé.

Viendront les baisers, bouches cousues, les cous se frôlant,
les mots réinventés et l'au-revoir timide. Un bras nous avait
joints que l'on croyait brisé.

Qu'elle était belle, la chair de notre chair, qu'avant la Noël,
la vie sut nous offrir. Depuis le funambule court et, parfois,
la corde rompt.

Son sourire jamais ne se brise, il a la parole lente, le verbe
riche. Un instant je crus que la douleur avait quitté cette salle
des pas perdus qui jamais ne reviennent.

jeudi 10 juillet 2014

Vie de crayon

Une minute de la vie d'un crayon
Et sans fin elle tournoie comme un
papillon.

 Elle sera jeté triomphalement
à la poubelle par l'enfant 
qui s'applique pour la première fois 
sur son dessin maladroit. 

Elle sera broyée par l'écrivain 
lassé de son manque d'inspiration,
ira rejoindre ses sœurs malmenées
depuis des heures dans l'harmonie

de leurs couleurs. Je préfère la 
voir s'envoler dans l'esprit merveilleux
De la fillette aux cheveux trempés 
Et devenir comme par magie un parapluie.



samedi 5 juillet 2014

Tissus de carnaval

Sagement alignés mais débordant
largement du rouleau qui les contraint,

ils offrent en silence leurs couleurs.
L'heure est grave, l'air de la fin juin

pesant. Des femmes à lunettes, encombrées
de mètres clairs, passent sans les voir,

ces étoffes chatoyantes vers lesquelles
elles courront dans neuf mois à peine,

mères et grand-mères aimantes, désireuses
du plus beau déguisement pour leur enfant

en carnaval. Arlequins, aventurières, mages,
annamites énamourées, tout sera alors bon pour

désordonner les sages rouleaux. Mais, pour l'instant,
taisons-nous, le monde n'aime pas les bouleversements.


jeudi 12 juin 2014

Le puits abandonné

Qu'est devenu le seau de zinc sonore
qui s'abreuvait au fond de l'obscure
paroi ? Les doigts se sciaient à le
lentement remonter mais quelle joie

de le verser dans le cuvier de bois
plein avant d'y plonger les bras puis
les mollets. Les ans ont passé et le puits,
tari, s'est effondré. La source d'eau

vive n'est plus que je traque pourtant
sans relâche. Un moment, un seul, me la
rapporte parfois : en juin, au matin,
quand la rosée froide d'oiseaux m'éveille.

jeudi 5 juin 2014

Pureté


La nature est beauté colorée
Épanouissement des fleurs
Entière royauté de tous les
continents. La rose éclôt

en chaque grâce du corps,
à chaque échange à chaque
café. Dialogue sensuel et 

Raffiné, les pétales blancs
S'offrent et s'ouvrent tels 
les mots, liens universels
Qui fleurissent sur nos têtes. 


les orphelins

A la mémoire de C. Faure

Je ne verrai plus ces yeux
mobiles et rieurs qui m'offraient
leur sourire. Toujours en vivacité,
ni arrêt ni pause, son âme était joyeuse. 

Un beau naturel, une franchise qui
longtemps après les rencontres 
s'accrochaient en moi et m'invitaient 
au courage. Une robe colorée, des
paroles en mouvement. 

Les fileuses n'ont pas voulu tisser
plus pour cette maman qui laisse
De beaux enfants et les Parques 
décidément ne sont pas mes 

amies. À croire qu'elles comptent
jalousement les liens de notre
univers. 
D'ailleurs je sais qu'Elle
veille sur ces petits qui seront
toute sa vie. Elle me fait signe

aussi dans ces quelques mots 
Et je souris en la revoyant dire
au revoir à Clément à Amandine
Et au petit Guilhem. 


mercredi 4 juin 2014

Le monde entre ses mains

Quand l'homme aime il se prend
pour Dieu et ses doigts
glissent sur la peau chérie. 

Il sent trembler la puissance
du plaisir, revit sa joie, éprouve
sa force devant l'immensité du

fabuleux destin, son parcours se
poursuit, il accapare le monde 
entier pour chuchoter aux indécis

son souffle de vie : il sourit devant
le fourmillement de ses mains offertes
à l'infini de sa précieuse création.


Deux gitanes

L'une blonde, l'autre brune.
Portant le même parfum. Sages
dans leur robe de papier lissé.

L'une avait la nostalgie des champs,
l'autre celle du fouloir de linge dont
on fait le papier des livres et des

procès. Elles attendaient tranquillement
qu'une main amie vienne les caresser,
hésitant entre l'une et l'autre avant de

les porter à la bouche et de les embraser.
Vous ne les trouverez pas, elles ont disparu,
l'une avec son bout filtre et l'autre papier maïs.

dimanche 25 mai 2014

Géocaching

Tu retournes la terre sans jamais la blesser.
Une branche, une pierre ont pour toi autant
de prix qu'une icône byzantine. Tu t'y initias,

tu y excelles et, à ton tour, tu parsèmes le monde
de ces trésors enfouis. Un jour j'aimerais découvrir
un cylindre secret par toi, un jour, dissimulé.

vendredi 23 mai 2014

Marges urbaines

La ville s'effrange et la campagne n'est pas.
Dans le fossé : un écriteau encadré de rouge
et barré. Le nom lui est dénié et les escargots

lents l'envahissent. Leurs coquilles visqueuses
éclatées disent son impossible franchissement.
Je frotte, du bout de la semelle, l'asphalte

poudreux et je pense aux mois futurs où la frange
s'émoussera et où la ville gagnera encore sur la
glèbe qu'elle desséchera en parallélépipèdes éteints.

Faubourgs, banlieues, périphéries, cités, les noms
s'empilent pour nommer la zone d'Apollinaire, le glacis
des artilleurs. Mon amour des villes y survivra-t-il ?

mercredi 21 mai 2014

En lisant, en écrivant

Le titre de l'ouvrage de Gracq jamais ne m'a quitté.
Vade-mecum orphelin des pages qui le firent, il préside,
tutélaire, à mes actions. Je ne puis écrire sans lire et

la découverte de la main amie sous mes yeux féconde
mon texte à venir. Cadou, Lilore, Vinyoli -sur qui
je parlerai vendredi- m'enseignent les mots et les vers

que vous lisez parfois en accrochant mon nom à l'angle
vif de votre regard d'enfant. Leurs lettres tièdes sont dans
une bourse de soie. Je les secoue et plonge la main pour

composer mes mots et mes images. Je m'y vois moins que
je ne les vois malgré la distance et le froid aigre du temps.
Je peux alors m'étendre et dormir jusqu'à plus soif. Enfin.

mardi 20 mai 2014

Le pied d'une chaise

Le patin de caoutchouc fait défaut
et la chaise est bancale, l'étudiant
s'agace, il frotte, peste puis se lève

et la quitte pour une autre plus stable.
Moi, je pense au pied esseulé, rejeté. 
Déjà qu'au lieu de naître torsade de bois

peint au bas d'un fauteuil Voltaire, il a été
ripoliné à la hâte dans un atelier aveugle du
su-est asiatique et le voici écaillé et amputé

de la seule douceur qu'il lui fut donné de connaître
dans cette vallée de larmes. Pauvre petit pied, puisse
la retraite le loger près de livres aux senteurs infinies.

dimanche 18 mai 2014

Nostàlgia de la sorra / Nostalgie du sable

Dunes impossibles sota les ulleres fosques,
sorra groguenca feta de restes d'un món gastat.

M'hi apropo amb el dit i reconec el verd profund
d'una ampolla de cervesa llançada al mar per un
desesperat, el roig apagat d'un maó perdut per qui

no pogué mai arribar a fer casa ni llinatge i el negre
dur del marbre d'una tomba tentinejant. Res de bo, res a veure

amb la sorra blanca de les platges de la meva illa enyorada,
fina i olorosa, feta d'engrunes de petxines i d'estelles de façanes
encalcinades per mariners intemporals. Acluco els ulls i somio...

***

D'impossibles dunes sous mes lunettes fumées,
du sable jaunâtre fait des restes d'un monde usé.

Je m'en approche du doigt et reconnais le vert profond
d'une bouteille de bière lancée à la mer par un
désespéré, le rouge éteint d'une brique perdue par qui

ne parvint jamais à faire une maison ni une lignée et le noir
dur du marbre d'une tombe chancelante. Rien de bon, rien à voir

avec le sable blanc des plages de mon île regrettée,
fin et odorant, fait de miettes de coquillages et d'éclats de façades
peintes à la chaux par des marins intemporels. Je ferme les yeux et rêve.

Être, n'être, naître, connaître

Être, n'être, naître, connaître,
les nœuds relient les mots
de l'essence et de l'existence.

Comme toi, je suis. Sans but,
sans vergogne, diraient certains,
je ne sais qu'une chose : on n'est

que dans l'échange, même secret
et infime, on y naît et on s'y développe
et nous (nous) connaissons...

samedi 17 mai 2014

Nœud

Liens tissés, esprits croisés.
Vies entremêlées dans l'indéfini
du temps. Sans cri, délicatement,
Je goûte ces instants volés.

Je ne construis pas, je vis face 
au moment offert, sourire et yeux
en ampleur. Beauté du geste 
Et malice d'une vie sinueuse.

Voir, cueillir, sentir et s'épanouir
dans un regard ravi. J'écris et 
Je ris sans détours. Enfin je 
Suis. 


vendredi 16 mai 2014

Bascule (seize mai)

Mai bascule vers juin, d'un coup,
d'un souffle dans les platanes
ombreux. Les bougies des aimés
se sont éteintes, d'autres viendront,

si proches pour fêter d'autres naissances.
À mes côtés, pâleur entrouverte, les œuvres
de Vinyoli. Une conférence sur sa poésie est
le prétexte à la relecture. D'autres arbres,

d'autres amours. Le poète fécond n'est plus
qui guide pourtant ma main, avec bienveillance.
Que bascule ce mois dans l'odeur des cerises
et qu'il me fasse oublier jusqu'au sens des paroles.

jeudi 15 mai 2014

Un tableau

Un tableau, ou plutôt son compagnon esseulé :
un cadre rococo de plâtre doré que le temps
a écaillé, tout contre le mur de la cave.

Je l'examine en m'y penchant, du bout des doigts.
La gorge accroche que rythment des clous rouillés et
tordus. Une toile y fut donc bien tendue qui m'échappe.

À vue de nez, je l'imagine fin XIXe. Un pompier essouflé
ou une innovation scandaleuse que l'on fut contraint de rouler
et d'emporter loin, pour l'épingler dans le secret d'une alcôve ?

Rien n'est plus beau que d'imaginer ce qui fut et n'est plus. Un temps,
bref et intense, le cadre de plâtre écaillé est sorti de la mort pour
me questionner sur ma place dans le monde et son cadre factice de stuc.

Rosella

Oiseau, beau parleur
Couleurs si magnifiques
Douceur à mes yeux...

Bouche à bouche

Désir longtemps tu
et qui affleure aussitôt :
orchidée vermeille.

Secrets

Par delà les mots et les sons,
le sang qui bat un peu vite aux
tempes et étourdit. Le soleil déjà

haut n'en peut mais. Les secrets ondulent
et se déploient. Les dialogues passés reviennent.
Avaient-ils disparu ? Je ne le crois pas...

Réponse

Partage de fleurs
Éveil souriant et doux
Secrets des mots

sans photo

Tes photos sont si justes que je ne sais
jamais si ce sont elles qui guident ta main

ou si tes mots les traquent sur la toile. Je n'ai
pas ta facilité et me donne des couleurs pour

pallier leur absence. Deux heures ont sonné
dans la nuit atroce. Dehors des ombres laiteuses

dessinent un paysage de feutre, le vent caresse
les deux fleurs qui ont poussé dans la jardinière.

Leurs couleurs ne sont plus ou pas encore. Seules
tes photos pourraient les raviver. Je les attends,

d'un sourire.

mercredi 14 mai 2014

Une perle

Au coin de l'œil, une perle salée
que le temps préserve, miroir serein
des baisers qui firent naître sur chaque

commissure d'autres perles. De désir, de plaisir.
Sucrées et non salées. Le temps qui vole les a
séchées, elles, plus vite que ne le firent nos langues

qui les burent ardemment et ne s'en rassasièrent pas.

Deux photos

Petites, offrande merveilleuse
qui m'accompagne de vingt-deux
en seize. La distance n'est rien et
nous sommes unis par une promesse
à laquelle le temps fut refusé.

Coin

Les mois passent et tu ne cesses de m'offrir
des étoffes, des songes, des pensées, nés
de coins petits et chaleureux, invisibles à qui

n'est pas nous. Ou plutôt à qui n'est pas toi
car c'est toi qui me les montres et m'en révèles
la saveur sucrée. Cuisines-tu toujours aussi bien,

curieuse, inventive, généreuse ? Je le jurerais.
D'ailleurs je te mens car je le sais déjà dans les
mots et les sourires de nos fils éblouis.

Mots

Mes mots s'écrivent sur tes nuits,
lettre à lettre, et ton dos se dévoile
sous leur frôlement. Frissons qui
les désordonnent soudain et fait

du miel, d'un souffle, un seul, le plus
doux des meli melos. Je ferme les yeux
et le retrouve. La tiédeur m'envahit et
m'apaise et je pense déjà aux mots que

le prochain frisson fera naître.

mardi 13 mai 2014

Fleurs de lune

Je t'offre des fleurs de lune 
que j'ai cueillies dans un 
coin d'étoffe qui me servit
de robe évanescente, autrefois. 

Sans eau, sans lumière elles 
fleurissent dans les lignes 
du temps. Gorgées de douceur
elles s'ouvrent dans le regard 

sélénien pour les heures 
creuses de la nuit quand tes 
yeux détachent les lettres des
lignes  poétiques afin de t'en 

faire un bouquet de sensations. 


lundi 12 mai 2014

Décanter

Je n'aimais pas autrefois
la lente décantation, je voyais
dans le sable léger une ennuyeuse
boue.

Le temps a passé qui me la fait voir
autrement. Légère, opaque, de la
couleur de ma peau vieillante, elle
prend le goût

de la fidélité. Sichuan est en moi que
je caresse sans l'ouvrir, jusqu'à ce que
je ne puisse m'en empêcher. Alors je
l'ouvre et t'y découvre

entre lettres et photos. Sage et discrètement
rebelle. Un erocaching de reflets et d'impressions
que je saissis du coin de l'œil avant de te répondre
sur le balcon des heures.

mercredi 7 mai 2014

L'arbre à oiseaux

Il est dans ma ville comme
dans d'autres des arbres 
à oiseaux. Quelques passants 
Surpris entendent  les cris des

Taches bleues, grises et vertes, 
belles âmes étonnées de se voir
offrir quelques  perchoirs 
urbains dans leur univers noir. 

Sans voler ils s'interpellent 
en babillant comme les 
Retraités assis sur les bancs
de bois. Faut-il les comparer ? 


Fleur de rosée

La vie, une goutte de rosée
Sans cesse renouvelée.

Dans les doigts de l'aurore
Elle s'offre et se prépare

Pour une matinale symphonie
Dans la nature encore endormie. 

A l'approche de l'arrondi elle
S'éveille et sourit au regard 

Des enfants de la prairie. 
Puis roule dans le vent, et

poursuit la fleur qui l'a
Vu naître pour disparaître

au coin des lèvres 
qui semblaient l'embrasser. 


Un mur


Les apparences n'ont qu'un 
Temps. Le réel se dévoile,
A pas feutrés dans le silence. 
Et le rideau- illusions est levé. 

A découvert, l'autre côté n'est 
guère différent, image et reflet
S'unissent sans préférence. 
Regarde derrière le voile : le

Banc de la solitude t'attend, 
L'espace de ta vie étoilée 
Est réduit. Enferme alors ton
cœur dans le ballon rouge,

Va. 

mercredi 23 avril 2014

Sauvegarde

La flamboyante lueur de mon cœur 
Se rassérène dans son cristal de verre
A chaque blessure dure de la vie. 

Elle s'endort et tâche de réparer ses douleurs 
Au parfum des lys blancs. Narcisse de pureté, 
Le reflet de ses formes devient réalité et vérité. 

Elle reprend le chemin de sa condition sous le 
regard acéré des geais moqueurs, et à chaque 
Pas défaillant, le songe pénétrant du refuge de

Paix forge son courage. Gardienne 
D'un trésor vu dans le transparent, elle appartient au monde des éclats.






lundi 7 avril 2014

Sur un coquelicot

Sur un coquelicot, six graines noires.
Ni poivre ni sable volcanique.

Une coccinelle jolie sommeille,
ailes repliées. Son souffle ne se

perçoit et n'était mon habitude
curieuse, je n'en aurais rien su.

Sur un coquelicot, six graines noires
et ton sourire qui scelle mes vers.

Coccinelle

C'est une petite coccinelle
Qui aime faire la belle, loin 
De chez elle. Elle lisse ses
Ailes. Dans une journée 

Elle engloutit toutes les
Mirabelles du beau Castel
Sans se soucier des
Amoureux de la balancelle. 

Dans un excès de zèle 
Elle vole vers l'arc-en-ciel
Et tombe sur Garmamel qui
fait d'elle son délice de caramel. 


samedi 29 mars 2014

L'ange aux pétales de sang

Le temps te fut volé, le temps nous fut volé,
l'Ange demeure en nous qui nous accompagne
et veille sur ses frères. Ses pétales sont de sang

et ne pèsent pas. Juste une couleur que chacun
de nous porte en lui, même s'il ne le dit pas. Moi
mes pétales, je te les dois que je regarde souvent.

Le mois des coquelicots

Le mois des coquelicots arrive. 
La nostalgie se fixe à mon cœur, 
Les points rouges au creux des
Chemins sont autant de poupées

Abandonnées par des enfants 
Capricieux. Chaque année depuis 
Plus d'un quart de siècle je ramasse
Ces fleurs fragiles et en fait mon

Livre de souvenirs et de pensées. 
Passé le milieu juin mes yeux 
Cherchent encore les oubliées.
Quand enfin mon cœur ressent

La fin des coquelicots je referme
Les pages et laisse s'envoler 
L'ange que je n'ai pas assez aimé. 


La gravité

Que grave est la vie, parfois. Souvent.
Et que pesante est la gravité qui nous
colle à la terre.

Comme toi, j'aime lever les yeux et
apercevoir ces funambules suspendus,
tout en grâce et en silence. Le temps

alors s'efface et nous redevenons ces
enfants ébahis que nous avons été,
tout deux, et qui aimaient le cirque.

vendredi 28 mars 2014

Un chapeau sans tête

Le chapeau sans tête passe
Devant la maison de silence. 
Il sait qu'il faut emporter Zoé 
Loin des parents devenus 

Irréels. Soudain la musique
Est forte. L'enfant s'ouvre aux
univers qui s'enchaînent. Là 
Deux rubans rouges font virevolter

L'acrobate. Ailleurs c'est l'homme
A la roue : il  tourne sa propre vie. 
Puis soudain le maestro enflamme
Les milliers d'yeux avec la comédie

De l'amour. les feux s'éteignent, le
Rideau écarlate ferme la porte au
Spectacle. Quelques notes se
Répondent encore et j'ai cru un
Instant apercevoir l'éclair de la perfection. 


mardi 25 mars 2014

Trois impressions passagères

LA JEUNE FILLE AUX PISTACHES

Elle est assise à côté de moi et accompagne
sa mère à une rencontre poétique, son rythme
n'est pas le nôtre. Elle tire de minuscules pistaches

d'une boîte étroite en aluminium puis elle les fend
et les ingère sans ciller. Les pistaches sont sans fin.
Pourtant elle cesse soudain de grignotter et remplit

la boîte qu'elle avait vidée. De coques menues, de reliefs
incertains. La nappe nettoyée, elle nous regarde enfin.

Curieusement, au même instant, l'atelier poétique lui
aussi cesse. Les pages repliées, l'apéritif pourra commencer.
Sans moi. Je serai déjà loin. La tête dans les étoiles.

LA JEUNE FEMME AU LIVRE EN CHINOIS

Elle s'est assise à côté de moi, jamais je ne verrai son
visage. Les cahots du TGV ne l'empêchent pas de tourner
avec parsimonie les pages d'un livre en chinois. Sur le papier

bouffant, étincelant, les idéogrammes se détachent noblement.
J'en vois peu par page. Beaucoup moins que sur une page occidentale.
Serait-ce un livre de poèmes ? Je ne sais ni ne saurai. Le train arrive

à son terminus, la jeune femme ferme le livre et s'en va, sans bagage.
Qu'adviendra-t-il de ce livre dont je perçois tout juste qu'il livrait un
soupçon d'humanité à un rescapé de la Babel désenchantée ?

LE JEUNE HOMME EN LEVITE

Le métro fait halte à hauteur du Marais. Un jeune homme monte. Il
est coiffé d'un chapeau noir à larges bords, le corps serré dans une
lévite étroite. Il semble pensif. Pourquoi pensé-je tout à coup à

Walter Benjamin dont Paris au XIXe siècle accompagne mon séjour
dans la capitale ? Je ne sais. Je pense aussi au restaurant de Jo Goldenberg,
rue des Rosiers, où je déjeunai il y a quelques année de poissons fumés

de la Baltique. Cette fois-ci, c'est moi qui descends pour rejoindre le Quartier
Latin. Où se rendait ce jeune homme qui caressait une barbe aussi grêle que
la mienne ? Peu importe. Là encore devait y battre une chaude humanité.

dimanche 23 mars 2014

Ridules

Je délaisse les photos sur papier glacé,
fallacieuses dans leur traitement grain à grain.
Je préfère l'empreinte de la vie en milliers

de rides nécessaires. Parmi celles-ci, j'aime
leur variante petite, toute en élégance : la ridule,
qui accompagne l'expression et souligne le sourire.

Arabique

J'aime les mots qui délaissent l'objet.
Tes arabesques sont de ceux-ci que je
ne relie pas à la lointaine Arabie.

Variant sur ce mot qui gonfle la bouche
d'une saveur singulière, je songe à
arabique. La gomme arabique sans qui

tant de lettres ne seraient jamais parvenues
à leur destinataire. La péninsule arabique
qui participe pour moi d'une géographie

de fantaisie touchée du doigt sur le globe
terrestre de couleur qui illuminait ma chambre
et que tu as su me rappeler en quelque vers sonnés.

samedi 22 mars 2014

Arabesques

Je n'attend pas et je retarde
Le moment où les doigts
pianoteront pour découvrir
Au détour d'une page quelques

Vers bien tournés et captivants. 
Alors je me vois  sourire et les
Ridules de mes yeux sont
Permanentes. Des heures ne

Suffisent pas à effacer les 
Arabesques qui plongent mon
Esprit dans un tourbillon de vie,
Il marche alors auprès des mots, 

Il prend ma main, la guide juste ici. 



Le fil de la nuit

La nuit est en son cœur, sur le fil,
dirait-on en espagnol. Le temps
se ralentit et les épaules se voûtent.

Nul désir de refaire le monde ni de
passer pour ce que l'on n'est pas,
le masque tombe et l'on est nu.

Alors, je profite de ce temps béni,
comme une miche de pain blanc,
pour te glisser de simples mots,

des mots de reconnaissance, à toi
qui me lis, malgré la distance, à toi
qui m'écris, malgré l'inconstance.

vendredi 21 mars 2014

Carnet de voyage

Engourdis et ravis, nos premiers 
Pas dans Rome furent pressés.

Un balayage rythmé sur les ruines
Obligées et nous voilà devant le

Cortège funèbre du Trastevere.
L'instant d'après et nous parlons

De résonance aux portes des
Enfers sous les regards patients

Des mafieux Puteolani. Un chien
Nous accompagnera dans les 

Voies  larges de Pompéi, bercés
par la grâce d'Angela et les lourds

Citronniers. Que serait aussi
La Campanie sans sa Grande Grèce 

A qui Paestum rend toujours 
Hommage et qui palpite depuis

Dans mon cœur.  Inoubliable
Instants du passé conjugué au présent. 


Le voyage

Ce voyage dont tu me parlas
et que je ne connais pas, tes
élèves et toi le reconstituez

patiemment, avec leurs images
à eux, avec tes mots à toi. Son
lieu ? L'Italie, sans doute. Son temps ?

Une marge de la vie de classe,
assurément, une fissure entre cours
et vacances où tu fais merveille,

indubitablement.

jeudi 20 mars 2014

Hors lieu

Le goudron était dur et sale,
la peau du bas de ton dos douce
et tiède. Tu m'avais invité, la
ville bruissait. Nous n'en avions
cure. Je t'étreignis mais n'osai
t'embrasser.

Couleurs et forme

D'abord la couleur, les couleurs, plutôt,
puis la forme : un rectangle harmonieux,
à l'élégance posée verticalement.

Je n'entre pas immédiatement dans tes
photos. J'en soupèse les harmoniques,
et fais jouer les tons comme s'il s'agissait

de cuivres. Tes photos sont des gongs calmes,
dont le silence appelle tes mots. Alors tu écris,
et je te lis, friand de te voir renaître.

Haïku poétique

Vertige du mot
Joie des lettres assemblées
Travail en poésie.

Connaissez-vous Plaisance ?

Posée dans les premières semaines
de mon séjour à Béziers, la question
ne laissa pas de m'intriguer : Villa,
villégiature, retraite, je ne savais

que penser. Jusqu'au jour où mes pas,
sans guide, me conduisirent à un coin
de rue tout contre le bief d'aval du
Port neuf. On eût dit une maison

bourgeoise tapie derrière l'épaisseur
du feuillage. C'était un restaurant coquet
où les habitués roulaient leur serviette
avant de s'en aller. Les repas y coulaient

sans souci de l'horaire pas plus que des
péniches qui délaissaient le quai. Je revins
à la nuit tombée pour m'emplir de senteurs
surannées et songer aux vies qu'elle reput.

Fermer les yeux

Fermer les yeux et sentir la peau
qui peu à peu s'abandonne, au
sommeil ou aux rêves anciens.

N'être plus que ce souffle inversé
qui donne en recevant. Délaisser
les Châteaux Yquem et les truffes

du Quercy, ne respirer le monde
que par ta peau qui pulse, avec
lenteur, imperceptiblement.

Basculer dans le sommeil, s'oublier
tout à fait et renaître au jour dans le
frottement de ton bras sur le drap.

Couleuvre de Montpellier

Sous la terrasse,  le ciment brûle
et les anneaux somnolent.

Faut-il partir si loin de la ville,
au frais, pour entendre parler,

encore de la fière Montpellier
qui extrait les poisons pour en faire

des philtres ?

Photothèque

Tes photos sont myriade,
Je les aime. Toutes, qui
jamais ne me rassurent.

Elles me troublent plutôt.
À dessein ? Je ne sais,
je n'en ai cure, je suis bien.

Merci L...E

Ta main

Sage elle s'enturbanne
pour me donner ce plaisir
Qu'elle seul' sait donner.

Caresse

La main repose, gravide,
sur la peau douce et les yeux
se ferment. Le souffle s'apaise.

La main sait qu'elle n'est plus outil.
Compagne ou mirage, elle donne
et ne retient pas. Le plaisir qu'elle

sème ne se veut pas prison. D'ailleurs,
il n'a pas de nom. Sous la caresse, la
main, naguère gravide, est funambule

de surface. Vestige de l'instant, sagesse
de la longue durée. Peut-on jamais caresser
hors de tout sentiment ?

lundi 17 mars 2014

Les tromperies de l'hippocampe


L'animal est étrange à ma main. 
Petite, je me suis toujours trompée
Pour le dessiner. Avec ma gaucherie 
Sa queue était recourbée à l'inverse. 

Adolescente, mes interrogations
d'helléniste le faisait chevaucher
Dans les steppes et les plaines
Désertes non de la mer mais

Des régions arides de la Dacie.  
Pour mes enfants je n'ai jamais
Pu leur expliquer vraiment la 
Vie de cet hybride mi poisson

mi cheval. A l'instant je souris
En pensant qu'il est bien temps
Que je l'étudie, moi qui pourrais
Cet été le croiser dans l'océan. 



Effleurement

La main légère retient le geste
Un papillon ne serait pas plus doux
Et le pouvoir des lèvres n'est plus

Rien devant l'approche de la 
justesse des mots cueillis et 
mêlés. Oui, ceux que l'on attend

Pas. Ils sont suaves comme le
Nectar des avettes, dans la beauté
Irréelle de l'arc-en-ciel. Justes 

Dans l'instant qui précède le
Toucher et ponctue l'attente 
Délicieuse d'une caresse aimée. 

HIPPOCAMPES

Les hippocampes ont accompagné
mes années de jeunesse. Mon oncle
Sindo les dessinait à la pointe sur

la terre blanche avant de l'enfourner
et d'en tirer un bouquet de couleurs.
Pépé délaissait le café pour m'amener

au marché où ils jonchaient la glace
pilée comme les crevettes grises de ma
lointaine Dunkerque.

Mon oncle Sindo les avait placés au centre
de sa cosmogonie marine, nostalgique de son
île perdue. Il était deux fois homme, son nom

-Gomila- et son prénom -Gumersind- provenant de
la même racine indo-européenne qui désignait
l'homme. Est-ce pour cela qu'il aimait ces

étranges poissons dont le mâle porte les œufs
dans une poche secrète ? Non, je crois qu'il aimait
vraiment ces êtres chimériques qui résistent à l'emportement

en s'accrochant indéfiniment à une algue gracile. J'ignorais
alors que l'hippocampe désignait aussi cette zone cérébrale
support de la mémoire qui me conduit à t'écrire aujourd'hui.

samedi 15 mars 2014

Baroque

T'en souvient-il ? Nous parlions
du baroque et de son étrange origine,
cette perle imparfaitement ronde en
portugais.

En te lisant, j'en ai ressenti la surface
inégale devant la perfection de tes vers,
comme si la différence n'était qu'illusion
et la passion unisson.

Le destin de Gaïa


Une seule goutte a suffi 
Pour attirer mon œil. 
Une perle lourde de liquide
Reflet du beau de la vie.

L'univers s'y mire et s'y pare
Comme dans le cocon d'un 
Jour de printemps proche. 
Ma main n'ose l'approcher. 

Je me penche et cherche à 
Comprendre le destin de cristal,
Parfaitement enclos de ma vie.
L'esprit décrypte les indices

Qui nourriront mes envies à 
L'infini. J'aime l'élément 
Universel. Je vais l'absorber, 
Me l'approprier. Rien de côté. 





vendredi 7 février 2014

Haikü de l'hiver 4

Barque sur l'étale 
Soupir du clair océan,
Bientôt la marée. 

Haikü de l'hiver 3

Papillon des feuilles,
Confusion de la nature,
Non, perfection tendre. 

jeudi 6 février 2014

Haïku de l'hiver 2

Le bleu du matin
Gelée fragile sur branches.
Beauté naturelle.


Haïku de l'hiver 1

Les lueurs de l'aube,
Longs jours tardifs de l'hiver 
Soudain un rayon.

Le chat libre



Le chat souple est parti
Loin des foyers chauds
Et des regards affectueux.
Finies les caresses tendres.

Plus d'attente plus de retour
Des maîtres trop longtemps
Absents. Plus de jeux inutiles,
Hauts en cris, généreux en

Friandises. Oui le chat s'en 
Est allé. Fier de son audace
Il compte les rayons du jour
Et savoure sur le mur d'en

Face la chaleur des pierres. 
Qui pourra lui dire les pleurs
Et les angoisses des enfants ?
C'est lui qui a quitté l'aisance.


mercredi 5 février 2014

Pleurs de lune



La lune, en hiver, pleure
Elle déverse tout son cœur.
Pour calmer ses malheurs
Elle fixe à la pendule son heure.

Elle s'éloigne et file chaque matin
Et perd un peu de son lait 
Dans un coin de terre isolé. 
Son œil est sans lendemain. 

Je ne peux ramasser les gouttes
De poussière scintillante. Je 
M'approche, elles n'ont pas de goût,
 je repars, drapée d'un voile rose.

mardi 28 janvier 2014

Géocaches gruissannaises

à Lionel Itié

Un ami précieux profite d'un sabbatique
hiver pour saupoudrer de caches le rivage
salin.

Sous sa main ferme et son œil de cristal,
une histoire renaît qui tendit de béton
le voile des pleureuses.

Nous revoici dans les années de plomb où
une valise de haricots valait plus qu'une vie
et l'occupant terré

dedans la casemate scrutait à l'horizon
l'inéluctable débarquant dont les rejetons,
un jour peut-être,

s'allieraient à la lignée de l'ennemi honni,
au pied d'un rouleau de papier par une signature
dûment géolocalisée.

dimanche 19 janvier 2014

Tanka jour de neige

Tombent les flocons,
La neige épaisse est douce
Le soleil réchauffe.

Le jour en janvier est blanc, 
L'air est caresse pour tous.


Écume

Disparaître dans l'écume 
Revenir à la source de l'amour 
Devenir la Venus des profondeurs.

Effacement du moi sans refus,
Poursuite du ressac, reflux du
Corps qui s'apprête à l'élément

Marin. Une renaissance, direz-vous.
Plutôt une formidable réserve  d'émois
Un élan spontané de sensations ravivées. 
 


Vivre en livre

Vivre en pages avec les
Mots embrassés. Un
Effeuillage discret s'entend
Dans le silence des murs
Ocres de la médiathèque. 

Le lecteur n'a plus sa tête,
Absorbé par les lettes venues
En nombre de la Mésopotamie. 
Il se fond dans l'ombre des
Manuscrits sans chercher à 

Résister. C'est sa nage curatrice,
Son bain de jouvence qu'il ne 
Partage qu'avec lui- même. Au
Détour d'un rayonnage je l'ai 
Aperçu, il m'a fait un signe. 


vendredi 17 janvier 2014

Inaccessible

Dans le déchirement glacé du 
Brouillard d'hiver, j'ai cherché 
A rejoindre la lune accueillante.
Pleine et épanouie elle était là,
A chaque virage elle m'attendait.
A chaque fois qu'il me semblait 
L'atteindre elle s'éloignait et 
Blanchissait avec la pointe du jour.
Je n'ai pas pu la voir s'éteindre. 
Depuis je cours et l'appelle sur
Les routes serpentines et grises,
Je lui demande de m'attendre 
Je ne veux qu'une caresse de
Rondeur laiteuse. Elle m'obsède
Au coin de chaque regard de jais. 


dimanche 5 janvier 2014

Ma main

Ma main n'est pas sage,
elle s'avance et m'échappe
dès qu'elle en a l'occasion.

Elle est parfois caresse ou 
Effleurement léger, sans geste
Juste en pensée ou en rêve.

Elle est ouvrière et sait parfaire
Les mets copieux et savoureux 
Qui ravissent les bouches des

hommes de mon sang. Elle écrit
les vers soigneusement choisis,
Chéris et parfois maladroits de

ma vie. Elle aime aussi parcourir
la Terre pour y trouver les trésors.
Alors, victorieuse et heureuse elle

m'aide à crier "je l'ai" quand la
première je retire la cachette non
Explorée comme née de l'inconnu. 

Elle presse et façonne dans son
creux la glaise de l'univers entier.


mercredi 1 janvier 2014

BON DIA / BONJOUR

Bon dia, i res més.
Que tingueu un bon dia:
un bon matí, una bona tarda,
un bon vespre i una bona nit.

Un amic filòsof m'acaba de convèncer-me'n.
No busquem una felicitat il·lusiòria amb
paraules gastades. Centrem-nos en el dia
d'avui, desprès de la ressaca de cap d'any.

I saludeu a tothom com si fos
el vostre veĩ o la marquesa
de les faves torrades.

***

Bonjour et rien de plus.
Passez une bonne journée,
un beau matin, une belle après-midi,
une bonne soirée et une bonne nuit.

Un ami philosophe vient de m'en convaincre.
Ne recherchons pas un bonheur illusoire à
grand renfort de mots usés. Concentrons-nous
sur aujourd'hui, après la gueule de bois du réveillon.

Et saluez tout un chacun comme s'il était
votre voisin ou la marquise
des fèves grillées.