à Jaume Benavente
Nous avions parlé jusqu'à plus soif,
feuilletant les livres qu'il m'avait
apportés dans un sachet de papier,
à l'enseigne d'une maison de sport, quand
il me proposa de me conduire sur les lieux
de son enfance et de son œuvre. La réalité
se teintait de fiction. L'air était tiède
et sombre. On donnait une fête bruyante dans
une belle demeure aux volets clos et au jardin
doré par l'alcool. Nous commençâmes par la rue
du Vent où vit encore sa mère. Nous y passâmes
rapidement de crainte de l'effrayer, puis nous
continuâmes par la rue de Salses où vivait le père
du héros de Loin d'ici. À mesure que nous entrions
dans le monde réel, la fiction s'imposait. Le climax
fut, une fois passée l'ancienne roselière, ces petites
maisons basses à bon marché, chamarrées de tons clairs
et qui semblaient tirées d'un Buñuel mexicain. Nous finîmes
par son ancienne école primaire, l"école nationale" comme
on disait alors dans une langue imposée qui n'était pas celle
des enfants des rues. Le métro nous sépara, prolongeant le parcours
dans une nuit de mots.
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